Riche rentrée littéraire de janvier 2022 que nous avions commencé à couvrir dans notre lettre précédente avec notamment Anéantir, le dernier Houellebecq et le très beau livre de Pascal Quignard, L’amour, la mer. Il reste encore beaucoup de nouveautés dont nous souhaitons vous parler, et non des moindres, comme le puissant nouveau roman de Pierre Lemaitre, Le Grand Monde. Ceux qui aiment Philippe Besson prendront le train, de nuit, avec son nouveau roman Paris-Briançon. Parution, en ce mois de février, de Regardez-nous danser, le nouveau roman de Leïla Slima (le tome 2 de la trilogie, Le pays des autres) et d’autres nouveaux romans de Frédéric Beigbeder, d’Adrien Bosc et de Catherine Hermary-Vieille. Jean Teulé vous fera le récit des trois journées de la bataille d’Azincourt, comme toujours avec humour et précision, Michel Zinc a choisi de nous raconter la légende de Tristan et Iseut. Enfin, un essai paru l’an dernier, dont nous nous devions de vous parler, le formidable L’invention des livres dans l’Antiquité, de la philologue espagnole, Irene Vallejo (traduction d’Anne Plantagenet). Et puis des nouveautés en bandes dessinées, le nouveau roman de John Green pour les adolescents et enfin, après tant d’années d’attente, la parution de la traduction française du livre culte néerlandais pour les enfants de Annie M. G. Schmidt : Jip en Janneke !
Le grand Monde
Pierre Lemaitre
Calman Levy
Date de parution : 25 janvier 2022
ISBN : 9782702180815, 592 pages, 24.96€
Quel plaisir de retrouver Pierre Lemaitre et ce formidable nouveau roman qui nous transporte dans le Beyrouth des années cinquante mais aussi en France et surtout au Vietnam. Le grand voyage, pour la part du récit qui se déroule au Vietnam, est comme le prolongement ou le pendant de Une sortie honorable, le dernier livre d’Éric Vuillard paru en janvier. Éric Vuillard nous décrit, pour l’essentiel, certains des aspects les plus sombres et les plus détestables des dessous de la Guerre d’Indochine. Pierre Lemaitre, lui, nous fait partager la vie des fonctionnaires coloniaux, petits et grands, désillusionnés et corrompus, indifférents, jusqu’à la compromission, au dur et inégal combat mené par les troupes françaises contre le Viêt Minh. Comme toujours, les histoires de Pierre Lemaitre, superbement construites, sont pleines de rebondissements. Pour la partie qui se déroule en France, il revient au roman policier. Pour la partie libanaise de cette prenante saga familiale vous retrouverez même, vers la toute fin du roman, une des intrigues d’Au revoir là-haut et de la trilogie des Enfants du désastre !
Pierre-Pascal Bruneau
Regardez-nous danser, Le pays des autres, tome 2
Leïla Slimani
Collection Blanche, Gallimard
Date de parution : 3 février 2022
ISBN : 782072972553, 368 pages, 22.89€
« Année après année, Mathilde revint à la charge. Chaque été, quand soufflait le chergui et que la chaleur, écrasante, lui portait sur les nerfs, elle lançait cette idée de piscine qui révulsait son époux. Ils ne faisaient aucun mal, ils avaient bien le droit de profiter de la vie, eux qui avaient sacrifié leurs plus belles années à la guerre puis à l’exploitation de cette ferme. Elle voulait cette piscine, elle la voulait en compensation de ses sacrifices, de sa solitude, de sa jeunesse perdue. » Regardez-nous danser, Leïla Slimani
1968 : à force de ténacité, Amine a fait de son domaine aride une entreprise florissante. Il appartient désormais à une nouvelle bourgeoisie qui prospère, fait la fête et croit en des lendemains heureux. Mais le Maroc indépendant peine à fonder son identité nouvelle, déchiré entre les archaïsmes et les tentations illusoires de la modernité occidentale, entre l’obsession de l’image et les plaies de la honte. C’est dans cette période trouble, entre hédonisme et répression, qu’une nouvelle génération va devoir faire des choix. (…)(Note de l’éditeur)
Un barrage contre l’Atlantique
Frédéric Beigbeder
Grasset
Date de parution : janvier 2022
ISBN : 9782246826552, 272 pages, 21.80€
Frédéric Beigbeder ne nous avait donc pas tout dit dans son très réussi Un roman français. Dans ce nouveau récit autobiographique, il nous parle un peu encore de son adolescence dans une famille de province de grands bourgeois, adolescence rythmée par les changements de résidence imposés par la garde partagée, une garde bien assumée par des parents divorcés qui ne font pas état de leurs différends devant leur deux fils. Mais, au-delà, ensuite, des amours célèbres de l’auteur, sans grand intérêt, Un barrage contre l’Atlantique, on l’aura compris, titre inspiré par Marguerite Duras, c’est surtout un hommage rendu à un homme hors du commun. Cet homme, j’ai eu la chance de le rencontrer il y a quelques années. Benoît Bartherotte est un véritable personnage de roman et Frédéric Beigbeder aurait pu lui consacrer tout son livre. Homme aux mille vies, il mène depuis près de quarante années un combat, réel, contre l’Atlantique qui rogne, nuit après nuit, la presqu’île qui est son domaine, à la pointe du Cap Ferret. Contrairement à la « mère » qui ne parviendra pas à combattre la mer de Chine qui envahit, année après année, la plaine cambodgienne de Kam, Benoît Bartherotte, lui, pour l’instant, a vaincu l’océan. Mais cet homme est bien plus que sa digue, plus qu’un Sisyphe des temps modernes, et l’on comprend qu’il fascine Frédéric Beigbeder. Pourtant il en a tant connu de personnages, célèbres et adulés. Mais Bartherotte est un sacré gaillard auprès duquel les célébrités de quat’sous font bien pâle figure. Bien qu’inégal, Un barrage contre l’Atlantique est un livre attachant comme son auteur, pour lequel il est difficile de ne pas avoir de sympathie.
Pierre-Pascal Bruneau
Colonne
Adrien Bosc
La Bleue, Stock
Date de parution : 5 janvier 2022
ISBN : 9782234079670, 120 pages, 20.17€
Adrien Bosc nous avait séduit avec Constellation (2014, Collection Bleue, Stock, grand prix du roman de l’Académie française), son premier et intéressant récit consacré aux passagers du vol Air France à destination de New York du 28 octobre 1949, tous tragiquement disparus lorsque l’avion percuta le Mont Redondo dans l’archipel des Açores. Parmi eux se trouvait Marcel Cerdan, amant de l’intransigeante et volcanique Édith Piaf, qu’elle avait, pour qu’il la rejoigne plus vite et pour son malheur, contraint de changer, à la dernière minute, sa cabine à bord d’un transatlantique pour une place sur ce vol. Colonne est d’une toute autre eau. Le livre nous fait partager l’engagement de Simone Weil, philosophe trop tôt disparue à l’âge de 34 ans, pour la cause républicaine contre les franquistes en 1936. À partir principalement de son journal et de notes prises par Simone Weil pendant ces semaines, ces mois, incroyablement intenses passés au plus près des combats, Adrien Bosc nous fait mieux connaître, mieux comprendre Simone Weil, jeune normalienne, agrée de philosophie à 22 ans, pour qui la philosophie était une manière d’être, le fil conducteur de sa vie. Alors qu’elle partageait le quotidien des volontaires composant la Colonne Durrutti, composée d’anarchistes espagnols et étrangers, elle est gravement blessée à la suite d’un bête accident. Simone Weil fait alors preuve d’un grand courage et d’une obstination incroyable, souhaitant à toutes forces partager le sort de ces combattants. Pourtant, elle prend conscience très vite de ce que la gauche espagnole est trop divisée pour bien combattre l’armée franquiste, bien mieux organisée et disciplinée. Adrien Bosc nous fait ainsi connaître les hommes qui l’entourent et participe à ce combat, dont le fascinant Charles Ridel, dit aussi Louis Mercier Vega, anarchiste et aventurier, disparaissant et réapparaissant chaque fois sous un nouveau nom d’emprunt. Un livre émouvant et touchant, qui nous fait plus encore aimer et respecter cette jeune femme hors norme qu’était Simone Weil.
Pierre-Pascal Bruneau
Crédit photo: ©Maxime Reychman
Paris-Briançon
Philippe Besson
Julliard
Date de parution : février 2022
ISBN : 978-2260054641, 208 pages, 20.71€
Philippe Besson nous fait prendre le train, un train de nuit, avec couchettes, qui roule de Paris vers Briançon. Onze heures pendant lesquelles de parfaits inconnus vont se rencontrer et se raconter. À l’heure des trains à grande vitesse et des vols à tarifs réduits, les trains de nuit n’ont plus beaucoup la cote. Alors pourquoi certains font le choix de prendre le train de nuit ? La promiscuité et la nuit sont propices aux confidences et favorisent des confessions qui auraient été impensables en d’autres circonstances, entre des gens que rien à priori ne rapprochent. Alexis, médecin solitaire partage son compartiment avec Victor, un jeune sportif de haut niveau. Ils sont voisins de Julia, divorcée, seule dans un compartiment avec ses deux jeunes enfants. Serge, VRP sur le retour, quarantenaire fatigué, dragueur sans illusions sur les effets de son charme, est leur voisin. C’est à Serge que se confiera Julia. Dans un autre compartiments quatre garçons et Manon. Ils ont tous dix-neuf ans et sont les voisins de Julia d’un côté et de Catherine et Jean-Louis un couple de retraités de l’autre. Catherine ancienne syndicaliste sympathisera vite avec un des jeunes qui partage les mêmes convictions politiques et une partie de belote s’organisera entre les deux retraités, le jeune militant et Manon. Philippe Besson annonce d’entrée que certains n’arriveront pas à Briançon et mourront. Un huis-clos réussi, des personnages qui prennent rapidement vie grâce à la prose simple et efficace de Philippe Besson.
Pierre-Pascal Bruneau
Les Exilés de Byzance
Catherine Hermary-Vieille
Albin Michel
Date de parution : 29 septembre 2021
ISBN : 9782226442390, 480 pages, 23.87€
29 mai 1453. Byzance, dernière capitale de l’empire romain d’Orient, tombe après le siège le plus sanglant de l’Histoire. La fière cité qui a résisté pendant plus de mille ans à tous les assauts s’effondre sous la violence de l’offensive turque. Jusqu’à l’intérieur de la basilique Sainte-Sophie, le peuple se défend avec ardeur et fièvre. Mais les vainqueurs n’épargnent ni les vieillards, ni les femmes, ni les enfants. Deux frères, Nicolas et Constantin Dionous parviennent à s’enfuir, l’un vers la Russie, l’autre vers les rives de la Méditerranée. Ils se font le serment qu’un jour, leurs descendants se retrouveront. Dans cette fresque magistrale qui traverse cinq siècles, la romancière Catherine Hermary-Vieille retrace, d’une plume éblouissante, le destin d’une famille prise dans les turbulences de l’Histoire, la douleur de l’exil et la quête de ses racines. (Note de l’éditeur)
Tristan et Iseult
Michel Zinc
Stock
Date de parution : 19 Janvier 2022
ISBN : 9782234091405, 180 pages, 20.17€
« La légende de Tristan et Iseut n’a pas survécu parce que les amants de Cornouailles se sont affadis, mais parce qu’ils n’ont cessé d’incarner ce que l’amour a de plus trouble et de plus troublant. » Tristan et Iseult
Michel Zinc, p.176
Dans ce « petit livre », selon sa propre expression, Michel Zink, professeur émerite passionné et passionant, expose les raisons qui ont rendu ce couple mythique et universel. Saviez-vous que ce fameux couple, aujourd’hui modèle, n’a pas toujours été bien vu ? Avec vivacité et grand sérieux, l’auteur envisage les différents thèmes de cette histoire à travers la littérature du Moyen Age jusqu’à Wagner, Cocteau et l’époque contemporaine. De versions en adaptations, le lecteur comprend comment et pourquoi cette légende a été transmise : quel est le rôle du « philtre d’amour » ? que signifie « aimer » ? les amants sont-ils enviables ou à plaindre ? Que vous soyez médiéviste averti ou novice, les récits et les citations analysés avec brio, humour et indulgence du grand spécialiste vous raviront et nourriront votre réflexion.
Véronique Fouminet, libraire au Temps Retrouvé
Azincourt par temps de pluie
Jean Teulé
Miallet-Barrault
Date de parution : 2 février 2022
ISBN : 9782080243447, 208 pages, 20.71€
« Les Anglais mènent leur sabbat sur le champ où se mèlent deux fureurs ensanglantées d’horreurs avec dans les poings une rage mortelle et des bruis de forge. » Azincourt par temps de pluie, Jean Teulé, pp. 135-136
Azincourt… nom d’une tristement célèbre bataille, une effroyable défaite française en 1415. Bien sûr, nous avons tous des souvenirs de cours d’Histoire… mais, ici, le récit est mené tambour battant par Jean Teulé. On connait la prose nerveuse, moderne, parfois poétique, parfois crue de l’auteur ; et on n’est pas déçu ! Jean Teulé a choisi de narrer trois journées, de la veille de la bataile à son lendemain. S’appuyant sur les sources historiques et littéraires, l’auteur montre, cartes et croquis à l’appui, à la fois la prétention des Français, preux chevaliers, et le courage des Anglais, menés par un roi cruel mais fin stratège. Un récit vif qui souligne le grotesque de la guerre mais émaillé de scènes cocasses au cours desquelles les chevaliers oublient leur fameux code…
Véronique Fouminet, libraire au Temps Retrouvé
L’Infini dans un roseau, L’invention des livres dans l’Antiquité
Irene Vallejo
Traduction Anne Plantagenet
Les Belles Lettres
Date de parution : 10 septembre 2001
ISBN : 9782251452210, 538 pages, 25.61€
Lauréat du Palmarès des 30 livres de l’année du Point, 2021
Lauréat du Palmarès des 21 romans et essais préférés de Télérama, 2021
« Martial et Perec ont raison : les objets, leur matérialité, leurs caractéristiques, les gestes qui leur sont liés ne sont pas anecdotiques. Ils sont décisifs. Dans le combat pour la survie des mots – si fragiles, simples bulles d’air-, le format et la matière première des livres ont toujours joué un rôle crucial : combine de temps ils durent, en quoi ils sont fabriqués, combien ils coûtent, à quels intervalles il faut les recopier. »L’Infini dans un roseau, L’invention des livres dans l’Antiquité, Irène Vallejo, p. 407
Quelle somme, quelle culture ! Et, surtout, quel plaisir ! Irene Vallejo nous conduit à travers l’épopée du livre et des bibliothèques, de l’Antiquité à nos jours. Bien sûr, le récit s’ouvre sur l’image de la bibliothèque d’Alexandrie et le rêve d’Alexandre le Grand, lui-même guidé par Homère. Mais, loin de développer d’arides et savantes analyses, l’autrice choisi de nous raconter le livre, sa puissance, son rôle et ses transformations. Les allers et retours entre passé et présent sont subtils et féconds, les adresses aux lecteurs contemporains sont efficaces, les souvenirs personnels abolissent la distance avec la remarquable érudite. Le lecteur est passionné par cette conteuse qui le guide à travers les civilisations qui toutes revivent grâce à cette « activité mystérieuse et inquiétante » qu’est la lecture. Comme Alberto Manguel, auteur de la célèbre Histoire de la lecture, laissez-vous charmer par cette saga passionnante !
Véronique Fouminet, librairie au Temps Retrouvé
La Dame Blanche, Quention Zuttion
La Dame Blanche
Quention Zuttion
Le Lombard
Date de parution : 25 janvier 2022
ISBN : 9782803679973, 208 pages, 24.52€
“ Tu sais… j’comprends. Nous, quand on est en deuil, on a juste à pleurer un bon coup, c’est vrai. Mais toi, tu peux pas pleurer toute ta vie.”
Estelle est infirmière en maison de retraite où elle accompagne la fin de vie de ses résidents. Avec le temps et les rencontres, alors qu’elle pensait s’endurcir, la jeune femme s’aperçoit qu’il lui est de plus en plus difficile d’accepter le départ de ses patients. Comment ne pas pleurer ceux dont elle partage le quotidien quand tous les jours est un jour de deuil. Après des débuts brillants sur le site Madmoizelle et aux Éditions Lapin, Quentin Zuttion intègre le prestigieux catalogue des éditions Le Lombard. “La dame blanche” est un roman graphique d’une grande douceur sur notre rapport à la vieillesse, l’écartement des personnes âgées de la sphère familiale et la fin de vie. Son bleu monochrome parcouru de touches de couleurs donne du corps à ce récit d’une grande poésie qui n’est pas sans rappeler le Polina de Bastien Vivès. Ici pas de ballerines mais des corps qu’on ne montre que peu. Quentin Zuttion sait aller chercher des histoires que nous n’attendons pas. Il est un auteur qui sait se renouveler dans ses thèmes comme dans ses propositions graphiques. Un dessinateur à découvrir et à suivre.
Tiphaine Hubert, librairie au Temps retrouvé
Amalia
Aude Picault
Dargaud
Date de parution : 21 janvier 2022
ISBN : 9782205087161, 148 pages, 21.80€
Cinq ans après Idéal Standard, Aude Picault revient avec un nouvel album one-shot à côté duquel nous ne pouvions pas passer. L’histoire se situe dans un futur proche où les petites Sansa et les petites Khaleesi – prénoms issus de la saga à succès Game of throne – sont adultes et travaillent, où nous n’en finissons pas d’épuiser et de polluer la terre, où la start-up Nation est partout, tout comme les réseaux sociaux qui ne cessent de nous influencer. Dans cette vie vraiment très proche de la nôtre, Amalia est fatiguée. Son travail l’épuise mais surtout… le quotidien de sa famille la fatigue. Elle s’occupe de son enfant Lili, 4 ans, gère les conflits entre son mari et sa belle fille, assure la survie de chacun et trie les déchets, même ceux du voisin. Jusqu’au jour où Amalia craque : la charge est trop lourde, le burn-out est là. Dans ce récit très réaliste, Aude Picault nous parle du burn-out maternelle. Un récit féministe, donc, qui s’attaque à un sujet très actuel. Quel plaisir de retrouver le dessin rond de l’autrice qui en un trait de crayon et deux points sait faire passer les « je t’aime » courroucés d’une Maman qui ne veut que le bien de sa famille. Et puis quelle finesse dans ce scénario fourmillant de petits détails, de petits moments de vie, cachés dans les bulles et les cases. A lire d’urgence et à offrir pour une pause bien méritée aux mères de votre entourage mais pas que…
Tiphaine Hubert, librairie au Temps retrouvé
Où vivaient les gens heureux
Joyce Maynard
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Florence Lévy-Paoloni
Éditions Philippe Rey
Date de Parution : 18 août 2021
ISBN : 9782848768885, 560 pages, 2.16€
(…) Joyce Maynard a été couronnée du Grand Prix de Littérature américaine 2021 pour son roman « Où vivaient les gens heureux » (Editions Philippe Rey). (…) Classique en apparence, cette « Family story » a séduit le jury par la subtilité et la modernité de son propos, l’élégance de son style et la virtuosité de son récit. Une belle fiction qui s’inscrit dans la tradition du « grand roman américain » Une modeste maison abritée par un frêne bicentenaire donnant sur un pré en friche, des pommiers et, plus loin, des bois : c’est là, dans la campagne du New Hampshire, où vivent les gens (plus ou moins) heureux imaginés par Joyce Maynard. Ils sont au nombre de cinq : la dessinatrice de livres pour enfants Eleanor, son mari bohème Cam, et leurs enfants : la secrète Alison qui se rêve en garçon, la toujours serviable Ursula et l’explosif petit Toby. Une tribu en apparence banale qui, des années 1970 à nos jours, subira les grandes révolutions sociétales de l’Amérique et les bouleversements intimes d’un foyer pas plus épargné que les autres par les aléas de la vie. Comme le déclare Cam avec une résignation que ne parvient pas à partager son épouse : « Plus on vieillit, plus on vit des moments difficiles. De bons moments aussi. Des gens qu’on aime meurent. On n’y échappe pas. »
Isabelle Lesniak et Philippe Chevilley pour Les Echos, Publié le 9 nov. 2021
Bienvenue dans l’anthropocène, John Green
Bienvenue dans l’anthropocène
John Green
Gallimard Jeune
Date de parution : 27 janvier 2022
ISBN : 978-2075157957, 368 pages, 21.80€
John Green est un auteur connu pour son roman “Les étoiles contraires” dont une partie se déroule dans notre jolie ville d’Amsterdam. Il nous propose ici un texte bien différent et assez particulier. En 2017, après une tournée promotionnelle éreintante, il attrape un virus qui attaque son oreille interne. Ils passent alors des semaines allité à ruminer de sombres pensées et l’envie d’écrire le quitte. C’est donc d’abord dans un podcast que ces petites chroniques voient le jour. Mais qu’est-ce que l’anthropocène ? Dans son introduction, l’auteur explique qu’il s’agit d’un terme inventé pour définir notre ère géologique marquée par l’incidence des humains sur notre planète et sa biodiversité. John Green fait un parallèle avec l’habitude grandissante de se voir proposer de tout noter sur 5 comme si chacun devait laisser son empreinte pour célébrer ou bannir la moindre chose. Il nous entraîne alors dans l’anthropocène du quotidien, chroniquant selon ses envies un oiseau migrateur ou son soda préféré en lui imposant, au final, une note sur 5. Ces courts avis courants sur quelques pages sont des micro-analyses de nos contradictions mais aussi la recherche de revenir au « je » et à l’authenticité pour cet auteur qui s’est longtemps dissimulé dans la fiction jusqu’à s’en perdre au moment ou son état de santé lui imposait la page blanche. Son but : suivre le conseil de Maurice Sendak « Vivez votre vie. Vivez votre vie. Vivez votre vie. » Naïves, charmantes mais aussi touchantes et documentées, ces chroniques sont les strates dont est fait l’auteur tantôt frivole tantôt profond. Une lecture qui a tout du loisir en attendant le printemps.
Tiphaine Hubert, libraire au Temps Retrouvé
Jip en Janneke / Jeannot et Jeannette
Annie M.G. Schmidt et Fiep Westendorp
Traduit du néerlandais par Émmanuèle Sandron
Éditions Format
Date de parution : 22 octobre 2021
ISBN : 9788366789111, 360 pages, 28.34€
Après tant d’années d’attente, Jip et Janneke est enfin traduit en français !
Certes les noms choisis, Jeannot et Jeannette sont vieillots, alors que ces histoires éternelles n’ont pas pris une ride. On ne comprend pas bien pourquoi les traducteurs n’ont pas conservé les noms néerlandais. C’est un peu comme pour Harry Potter, pourquoi aller chercher des noms français qui ne ressemblent à rien, Poudlard ou l’horcruxe de Poufsouffle n’apportent pas grand chose au récit en français et il eut été plus simple de conserver les noms originaux en anglais. Enfin, ne boudons pas notre plaisir et espérons que les autres histoires de la merveilleuse Annie M. G. Schmitt seront bientôt traduites.
Pierre-Pascal Bruneau