De belles nouveautés en ce mois d’avril, plusieurs nouveaux romans, de Pierre Assouline, Marc Dugain, Metin Arditi et de Michèle Fitoussi. Deux biographies qui nous mènent au bord de la Méditerranée, au moins au début dans le Nageur de Pierre Assouline qui nous raconte avec passion, l’histoire d’un grand champion broyé par le destin et par Vichy. Michèle Fitoussi, dans un livre touchant et souvent drôle, nous parle de sa famille et des juifs de Tunisie. Marc Dugain excelle à nouveau dans le roman politique, palpitant et bien entendu très (très) actuel.
Gallimard, Collection Blanche
Date de parution : 30 mars 2023
ISBN : 9782072985393, 256 pages, 23.00€
« Nakache et Cartonnet. Pour le public les deux font la paire. Quand ils se quittent c’est pour mieux se retrouver. » p.74
Nous aimons les biographies et les livres historiques de Pierre Assouline, particulièrement quand il trouve un angle original comme dans Le portrait ou dans Sigmaringen. Avec Le Nageur, il revient à la forme de la biographie classique, mais on le sent tellement proche de cet homme, que ce récit a un ton très personnel, comme s’il faisait le récit d’un membre de sa famille, et c’est cela que j’ai aimé dans ce nouveau livre. Dans Le nageur, l’admiration et le respect, la fascination presque, que Pierre Assouline a pour cet homme, emportent le lecteur dès les premières pages. L’écriture et le rythme d’abord, la tension est maintenue tout ou long du récit, aucune baisse de régime, comme un nageur de fond qui se donne le luxe de sprinter de temps à autre pour le plaisir. Même si dès le début on sait qu’il sera trahi, déporté avec sa femme et leur toute petite fille, on suit le récit comme dans un roman policier. Et puis, comme toujours dans ses livres, la qualité du récit, le minutieux travail de recherche, donnent au récit, sans le rendre ennuyeux, loin de là, le sérieux d’un travail universitaire mais avec l’attrait d’un roman.
Pierre-Pascal Bruneau
De quelques frontières, Philippe Claudel
De quelques frontières
Philippe Claudel
Guérin, Éditions Paulsen, Collection Paysages Écrits
Date de parution : 9 juin 2022
ISBN : 9782352213659, 102 pages, 11.50€
» J’ai dit le moment d’enfance où la frontière du monde sensible s’arrête à la bordure du paysage, au-delà de laquelle, s’il me vient le désir de la franchir, il me sera impossible de revenir avant la nuit à la maison, ce qui est chose impensable. Je contemple les lointains de collines et de champs, des bois déjà embrumés par l’approche du crépuscule, la lente et minuscule progression des troupeaux lointains vers les étables qu’on éclaire déjà, les nuages longs au ventre soudain rosé tout au bout de l’horizon, et je tourne le dos à tout cela, en soupirant de ne connaître cet ailleurs que par le regard, et je m’en reviens en courant vers mon pays familier, vers ma maison. »
L’autre jour, farfouillant dans les rayons de la belle librairie de Chamonix, la maison Landru (aucun lien avec lui), j’ai découvert un petit livre de Philippe Claudel, (presque) l’enfant du pays, grand montagnard et amoureux, comme son ami Sylvain Toussaint, de ces impressionnantes Alpes qui dominent la vallée. Ce livre est publié chez Guérin, (éditions chamoniardes connues pour sa riche collection de livres sur la montagne), dans la Collection Paysages.
Écrits. Dans ce petit ouvrage, Philippe Claudel se livre et nous fait partager le regard qu’il porte sur son oeuvre, des livres qui ne sont ni tout à fait des romans, ni tout à fait des policiers, ni auto-fiction, ni autobiographiques mais pourtant presque tous imprégnés de sa vie et de ce pays de Lorraine qu’il aime tant. Ceux qui aiment Philippe Claudel, et vous êtes nombreux, seront séduits par la sincérité et la pertinence des réflexions d’un de nos plus importants auteurs contemporains.
Pierre-Pascal Bruneau
Albin Michel
Date de parution : 29 mars 2023
ISBN : 9782226478108, 272 pages, 21.19€
» C’est dans cet esprit que je me suis fait élire et j’entends que le gouvernement gouverne, que le Parlement parlemente et que j’élabore les grandes orientations du futur. » p.18
Selon la formule consacrée « Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite. » Fortuite, peut-être, mais ressemblance, il y a, et vous reconnaitrez certains grands serviteurs de l’État dans le nouveau roman de Marc Dugain. Le personage central est président de la république et la plus grande partie du roman se déroule à L’Elysée, au « Palais » ou au « Château » , comme disent les initiés. Toute l’actualité, l’actualité récente est présente, Poutine, aussi glaçant qu’il est possible de l’être, la guerre en Ukraine, un projet de loi très controversé, des manifestations dures, des violences policières, assassinat commandité au nom et par la République etc. tout y est ou presque. La vie privée du président sert de toile de fond à ce roman. Le président, évidemment, mène une vie privée hors des normes bourgeoises. Les temps du gaullisme étant révolus depuis bien longtemps, la vie du président est en accord avec les mœurs de notre époque : un mariage maintenu pour les apparences imposées par la vie publique, bisexualité féminine, gestation pour autrui, cocaïne etc. Alors, le Président parviendra-t-il à surmonter les multiples obstacles, et non des moindres, qui surgissent devant lui ?
Pierre-Pascal Bruneau
Reste, Adeline Dieudonné
Éditions de l’Iconoclaste
Date de parution : 6 avril 2023
ISBN : 9782378803544 , 282 pages, 23.00€
« Il y a une part de transformation dans les histoires d’amour, j’en suis certaine, mais le désir qui meurt, c’est le désir qui meurt. Point. M. est mort. Elle l’a retrouvé, gisant sur le lac. Elle, c’est son amante. Ils étaient en week-end dans un chalet prêté par son ami, Jacky, qu’elle connaît depuis très longtemps. Elle aimait être l’amante de M. Elle aimait qu’il n’y ait rien d’autre que l’amour entre eux et que le quotidien n’abîme pas cette relation. Elle n’aime pas l’idée qu’il va falloir rendre ce corps à celle qu’il a épousée. Ce serait sortir de la vie de M. pour toujours, ne plus être l’amante, ne plus être l’aimée. Alors, elle garde ce corps et pour ne pas qu’elle s’inquiète, elle écrit à l’épouse innocente.«
Tour à tour provocatrice, romantique, répugnante et poète, Adeline Dieudonné nous étonne à nouveau dans ce troisième roman. Dans ce récit, elle s’autorise tout pour nous parler avec originalité et brio de la douleur de l’absence et de la solitude mais aussi – surtout ? – des femmes. Un titre follement singulier pour une autrice à suivre.
Tiphaine Hubert
Stock, Collection La Bleue
Date de parution : 1er mars 2023
ISBN : 9782234090477, 288 pages, 22.78€
« (…) je revendique mes provenances et mes constructions plurielles, être à la fois juive et laïque, tunisienne et française me sentir grecque en Grèce, Italienne en Italie, et tout autant méditerranéenne, mélanger en moi l’Orient et l’Occident. Une séfarade d’Europe selon la formule du Hida. Rien de figé ni d’assigné. De la fluidité avant tout. Des racines, certes, mais pour mieux m’en détacher. » Pages 182 et 183
Michèle Fitoussi, journaliste et éditorialiste au magazine ELLE, a écrit treize livres, dont plusieurs biographies très remarquées, Helena Rubistein, la femme qui inventa la beauté (Grasset, 2010) et Janet, biographie de Janet Flanner, première correspondante du magazine The New Yorker, à Paris (JC Lattès, 2018). Avec Ma famille de Pantin, Michèle Fitoussi nous parle de sa famille. Française, née en Tunisie de parents et de grands-parents français, elle y a vécu les cinq premières années de sa vie. Ce récit est touchant mais aussi très intéressant parce que Michèle Fitoussi mêle intelligemment l’histoire de sa famille à celle des juifs de Tunisie. Sans pour autant lasser le lecteur avec trop de détails et de références savantes, elle situe l’histoire de sa famille dans un contexte historique qui donne une dimension beaucoup plus large à son récit. Elle raconte avec chaleur et affection l’histoire de ses oncles et tantes, de ses parents, des amis et des proches et souligne l’importance des origines géographiques : les juifs Granas, originaires de Livourne en Toscane, venus d’Espagne et du Portugal, sont snobs et regardent de haut les juifs Touansas (ou Twansa), plus nombreux et souvent pauvres, originaires du Maghreb. Mais les distinctions ne s’arrêtent pas à ces deux communautés et l’on découvre la grande diversité des juifs tunisiens : « Un Juif de la Hara et un Juif bourgeois, un Juif italien et un Juif djerbien, un Juif sioniste et un Juif nationaliste, un Juif communiste et un Juif religieux, n’avaient pas grand chose en commun » (page 177). Et puis il y eut le décret présidentiel de 1910 et la loi Morinaud de 1923 (équivalent tunisien du Décret Crémieux de 1870, pour les juifs d’Algérie) qui permettront aux juifs tunisiens d’acquérir la nationalité française. Un quart des juifs de Tunisie, soit environ vingt cinq mille personnes, adoptera la nationalité française. Dès lors cette communauté juive, éduquée et cultivée, n’aura de cesse que de se franciser. Les prénoms juifs ou arabes deviendront français, un Choua devenant Charles et une Myriam devenant Marie. Le français sera leur langue. Les juifs tunisiens naturalisés français adopteront ainsi la culture, les coutumes et les habitudes françaises, laissant de côté (sauf certaines traditions culinaires) leur héritage méditerranéen. Cette loi, comme en Algérie, creusera définitivement un fossé entre les juifs et leurs voisins « arabes » qui eux resteront jusqu’à l’indépendance des citoyens de second rang. La France, celle de Vichy, les abandonnera. Cependant, le Bey, avec le consentement de Jean-Pierre Esteva, le résident général, représentant de Vichy, protégera les juifs des lois scélérates, avec l’aide de la population musulmane. Tout basculera lorsque les allemands occuperont la Tunisie, pendant six mois, en 1942, jusqu’à l’arrivée des alliés en 1943. Les juifs vivront alors des moments très difficiles : arrestations lors de plusieurs rafles, privations, amendes exorbitantes exigées des communautés juives, enrôlement forcé dans des camps de travail (en Tunisie), un sort certes peu comparable aux atrocités de la Shoah mais très dur néanmoins. Après la guerre, l’indépendance venue en 1956, le gouvernement du Néo-Destour d’Habib Bourguiba fera preuve de tolérance vis-à-vis de la communauté juive. Cependant, l’arabisation du pays, et notamment l’imposition de la langue arabe, poussera la plus grande partie de la communauté à émigrer vers la France ou Israël. Aujourd’hui la communauté juive compte moins de deux milles personnes, dont la majeure partie vit à Tunis.
Pierre-Pascal Bruneau
Grasset
Date de parution : 22 mars 2023
ISBN : 9782246834359, 198 pages, 20.71€
Quelle a été la vraie vie de Jésus ?
À Nazareth, au début de notre ère, deux très jeunes enfants jouent dans la rue. «Mamzer ! » lance l’un à son camarade. « Bâtard ! ». Personne, dans le petit village de Nazareth, n’ignore que Marie a fauté avec un légionnaire romain. Elle est une fille-mère, rejetée et méprisée. Jésus comprend pourquoi, tout autant qu’elle, il sera à jamais exclu de sa communauté : telle est l’exigence de la loi juive à l’égard des bâtards.
Grandissant, Jésus n’a d’autre entreprise que de réformer cette règle d’exclusion. Jusqu’au jour où il rencontre un autre Mamzer. Outre d’être un bâtard, Judas est laid, brillant, et révolutionnaire. Il a un plan. S’appuyant sur le beau, non moins brillant, et réformateur Jésus, il met en marche sa vengeance. Quelle est la part de sincérité, quelle est la part de calcul de ces deux jeunes hommes parcourant la Palestine avec un message d’inclusion ?
Un roman audacieux, étonnant, passionnant, qui ré-interprète la vie de Jésus dans ses plus grands épisodes. Sa présentation aux docteurs de la loi, son sermon sur la Montagne, la multiplication des pains, les quarante jours dans le désert, tant d’autres moments de la culture religieuse universelle sont revisités à l’aune de l’inguérissable blessure d’enfance de Jésus et de sa relation aussi fructueuse que dangereuse avec Judas. (Note de l’éditeur)
ESSAIS
Les nuits que l’on choisit, Elise Costa
Éditions Marchialy
Date de parution : 22 février 2023
ISBN : 9782381340395, 224 pages, 23.00€
« Vous vous demanderez sûrement si les affaires criminelles relatées ici ne seront pas trop dures à lire. Mon curseur du sordide étant cassé depuis longtemps, je ne peux pas répondre à cette question. Mais je peux vous promettre, en revanche, que le crime n’est pas la raison d’être de ce livre. Le crime n’est qu’un prétexte. J’espère qu’en le refermant vous en saurez plus sur l’humanité et l’inhumanité en chacun de nous. «
Elise Costa est chroniqueuse judiciaire pour le media Slate. Dans ce livre, elle nous raconte son métier de journaliste et les affaires qu’elle a suivies. Elle nous fait également part de sa position entre deux eaux, ni enquêtrice, ni juriste et pourtant présente tout au long des procès à la recherche de la vérité. Des salles d’audience aux couloirs des tribunaux, elle nous parle de sa méthode de travail, de ses nuits parfois trop courtes ou trop longues, de ses doutes, de sa fille et de l’humain qu’elle traque sous le monstre. Pour Elise Costa, chacun peut un jour se retrouver dans le box des accusés et même les plus affreux des crimes sont souvent commis par des gens bien ordinaires. Un livre d’une grande richesse qui alterne les rapports de procès et les réflexions de la journaliste comme pour nous laisser souffler entre deux atrocités. Ou peut-être que c’est l’autrice elle-même qui se permet de reprendre son souffle en mettant en pause sa vie aux quatre coins de la France pour se livrer à cette exploration tout à fait palpitante.
Tiphaine Hubert
Le scénario de Prague, Natalia Borodin
Éditions Cherche midi, Collection Les Passe-Murailles
Date de parution : 6 avril 2023
ISBN : 9782749176246, 422 pages, 24.57€
« Aurait-il pu nous apprendre davantage ? Ses cours étaient passionnants mais ce n’était qu’une petite partie visible de notre relation. Son influence, sa façon de nous donner confiance en nous étaient une partie invisible et indicible de notre lien, il nous a appris à tout questionner, à ne nous fier à rien, à ne pas nous satisfaire de la surface de la surface des histoires, et de ce fait, des humains. » p. 421
« Mais regardez-vous, vous ne parlez qu’anglais et vous faites comme si écrire dans une langue qui n’est pas sa langue maternelle était un jeu d’enfant ! » p.262
Une jeune Slovaque ; Lara, rêve d’intégrer la prestigieuse Académie des arts, à Prague… et elle y parvient ! Pour notre plus grand plaisir, elle raconte ses années d’étude et les suivantes dans un récit, largement autobiographique, passionnant. Le personnage central autour duquel elle se construit est son fascinant professeur de scénario, son maître… Roman Kantor. Or, celui-ci n’était autre que Milan Kundera ! Oui, le célèbre écrivain tchèque qui a émigré en France en 1975. Le lecteur est alors embarqué avec Lara : la vie estudiantine, les films, la littérature, le caractère à la fois charmeur et ombrageux du maître. Mais, les chars russes entrent en Tchécoslovaquie… il faut pourtant obtenir le diplôme ! Certes, mais la seconde partie se déroule en France, en Belgique, aux Etats-Unis. L’influence du maître est toujours vive. Natalia Borodin nous offre un livre qui donne un éclairage nouveau non seulement sur la période mais aussi sur le cinéma et la littérature. Truffé de références, ce récit donne aussi envie de se (re)plonger dans Diderot, Dostoïevski, Proust, Kundera et bien d’autres, ou de se ruer dans une salle de cinéma pour revivre les émois de la jeune cinéphile, devenue scénariste.
Véronique Fouminet
Que faire du passé ? Réflexions sur la cancel culture, Pierre Vesperini
Fayard
Date de parution : 18 mai 2022
ISBN : 9782213722177, 256 pages, 21.85€
« Le monde nouveau qui s’annonce, débarrassé de ces vestiges de la domination raciste que seraient la liberté de pensée et d’opinion, est un monde unilatéral : sans confrontation, sans dialectique, sans lutte. Une utopie puritaine, un immense safe space où seuls les « bons » sont appelés à s’exprimer. Et où bien sûr seuls les « bons » peuvent voir leur mémoire honorée dans l’espace public. Mais qui sont alors les bons ? » p.169
Pierre Vesperini, chercheur au CNRS, helléniste, latiniste, philosophe et historien, montre le plus souvent la distance qui reste entre « les Anciens » et notre époque ; il n’était pas particulièrement étonné par le mouvement de la « cancel culture ». Mais, face au projet d’un professeur du département d’études classiques de Princeton, Dan-el Padilla Peralta, de «sauver les classiques de la blanchité », le philologue s’est dit que cette question méritait réflexion ! Il nous propose donc dans cet ouvrage de prendre une pause et de regarder l’Histoire : non seulement les faits mais leurs implications et les idéologies qui les sous-tendent ou suscitent. La première partie est ainsi une réflexion sur ce que l’on nomme « culture » et l’attitude adoptée face à elle. C’est une très intéressante réflexion sur la notion d’« héritage », avec ou sans majuscule. La seconde partie est le recueil de trois courts essais, initialement parus dans Philosophie Magazine, qui démontrent et dénoncent l’absurdité de certaines positions militantes. Dans ces études, la réflexion est soutenue par des références ou des anecdotes précises et permet de montrer aussi les erreurs volontaires de certains opposants. C’est un ensemble riche et sérieux qui parfois déroute mais qui a le grand mérite d’inviter à réfléchir à partir de propositions d’un chercheur qui dit clairement d’où il parle.
Véronique Fouminet
La capitale de l’humanité , Jean-Baptiste Malet
Bouquins Éditions
Date de parution : 6 octobre 2022
ISBN : 9782221218471, 384 pages
« Comment expliquer cette étonnante similarité entre une cité idéale de 1913 et les discours des techno-prophètes de xxiè siècle ? Cette ville aurait-elle quelque chose à nous apprendre des utopies de communication qui saturent de nos jours l’espace médiatique ? » p. 22
Le journaliste Jean-Baptiste Malet, prix Albert-Londres en 2017, livre ici un récit étonnant. Parce qu’il découvre, par hasard, à Rome, les plans d’un projet incroyable, l’auteur décide d’en savoir plus et nous en offre le récit. Un projet incroyable, vraiment : il s’agit d’élaborer une ville qui réunisse l’élite du monde entier, dans tous les domaines !
Deux artistes américains vivant à Rome, Olivia et Hendrik Andersen, associés à un architecte français, Ernest Hébrard, sont à l’origine de cette utopie urbaine. Jean-Baptiste Malet retrace minutieusement leur histoire : le projet, la recherche des soutiens prestigieux et des fonds, le livre qui présente le projet. Mais… l’Histoire empêchera-t-elle la réalisation du « Centre mondial de communication » ? Ce récit, entrecoupé d’anecdotes et de documents historiques, se lit comme un roman. Le lecteur se prend d’intérêt pour ce drôle de trio et, lui aussi, espère la réalisation de cette belle utopie, et, de rebondissement en surprise, brûle de savoir la suite. C’est aussi une belle réflexion à la fois sur l’urbanisme et la place de l’Homme face au progrès.
Véronique Fouminet
Éditions Glénat, Collection 1000 feuilles
Date de parution : 15 mars 2023
ISBN : 9782344042717, 264 pages, 33.35€
Le combat d’un homme pour la liberté de la presse En 2018, après avoir été victime d’une tentative d’enlèvement et d’assassinat dans son pays d’origine, le journaliste d’investigation Taha Siddiqui trouve refuge en France. A travers ce roman graphique, et en compagnie d’Hubert Maury, il revient sur sa jeunesse, son parcours, et son combat pour la liberté de la presse. Quand les parents de Taha quittent le Pakistan pour l’Arabie Saoudite c’est dans l’espoir d’une vie meilleure. Au pays de La Mecque, le quotidien du petit Taha est déjà régi par un islam rigoriste mais quand son père se radicalise, les choses se corsent. C’en est fini des coloriages de Batman et Superman, place à des livres moins profanes. Désormais les super-héros de Taha seront les leaders religieux ! En pleine Guerre du Golfe, la police des moeurs commence à sévir et bientôt il faudra aussi renoncer au foot de rue.
C’est en l’an 2000 qu’une brèche s’ouvre… La famille se réinstalle alors au Pakistan où l’armée a pris le pouvoir. A l’âge de 16 ans, Taha rêve de faire des études d’arts, mais son père a d’autres projets pour ce fils qui rechigne à suivre le droit chemin. En attendant, Taha va découvrir une Société faite d’interdits que la jeunesse s’efforce de contourner. Jamais il ne s’est senti aussi libre malgré l’insécurité ambiante. Les attentats du 11 septembre vont profondément l’impacter, tout comme son entrée à l’université. Après avoir connu l’école coranique et la censure, Taha va progressivement s’émanciper et trouver sa voie… il sera journaliste et débutera sa carrière sur une chaîne » hérétique » au grand dam de son père ! Sa détermination, sa foi en son métier et son engagement politique feront de lui une cible comme tant d’autres condisciples à travers le monde.
Véritable chronique d’enfance et d’adolescence, Dissident Club retrace avec un humour libérateur et décomplexé le quotidien d’un jeune homme aux prises avec les fondamentalistes religieux ainsi que son combat pour un accès à l’information et la liberté d’expression. Coécrit et mis en scène par Hubert Maury, ancien diplomate devenu auteur de bandes dessinées, ce roman graphique aussi réjouissant qu’édifiant nous offre une vision limpide du Pakistan sur les trente dernières années ainsi qu’une certaine réflexion sur la religion, ses dérives et les fractures d’une communauté. Un témoignage touchant et sensible qui nous rappelle aussi bien L’Arabe du Futur que le travail de Guy Delisle. Aujourd’hui Taha Siddiqui (Prix Albert-Londres 2014) et sa famille vivent à Paris. Taha a ouvert en 2020 The Dissident Club, un café & bar où les dissidents du monde entier se retrouvent pour échanger et qui propose régulièrement des conférences, des expositions et des projections. Un album en partenariat avec Reporters sans frontières et France Info. (Note de l’éditeur)
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